Incident d’Ankoro : comprendre le contexte pour bâtir des solutions durables hors des limites du Parc National de l’Upemba
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Communiqué de Presse
Lusinga, le 13 juillet, 2025 – Le Parc National de l’Upemba (PNU) aimerait exprimer sa profonde tristesse suite à l’incident tragique, une attaque d’éléphant, qui a occasionné le décès inopiné d’une jeune fille à Ankoro, dans le secteur Kamalondo, territoire de Manono, province du Tanganyika en date du 9 juillet 2025. C’est dans toute sincérité que nous adressons nos condoléances les plus attristées à la famille de la jeune fille et a toute la communauté affectée par cet événement.
Les gestionnaires du parc ont suivi avec intérêts toutes les discussions, réactions et publications autour de l’incident. Nombreuses de ces réactions n’ont pas su démontrer une compréhension du contexte de l’incident et des efforts récemment déployés par l’ICCN et le PNU. Il nous semble donc nécessaire et opportun d’éclairer l’opinion sur certains aspects de ce dit contexte.
Sur le point de vue géographique, il est important de rappeler que la localité d’Ankoro se trouve à environ 200 km de la limite nord du PNU – alors que l’ensemble du parc s’étend sur 170 km du nord au sud. La gestion de cet immense territoire est déjà extrêmement complexe, et la distance d’Ankoro par rapport au parc confirme qu’il ne s’agit pas ici d’un incident survenu dans la zone sous gestion directe du parc.
La présence sédentaire des éléphants à Ankoro est dû à l’invasion de leurs couloirs de migration. En effet, les anciennes voies de migration reliant le parc à cette région ont été interrompues par l’expansion des activités humaines, et les dernières traces de ces migrations date des années 1997. Donc, les éléphants présents à Ankoro ne peuvent pas être considérés comme “les éléphants du PNU”.
Malgré cela, l’ICCN et les gestionnaires du PNU ont pris l’initiative de déployer récemment six colliers GPS sur les éléphants dans cette zone éloignée, pour mieux comprendre leurs mouvements et appuyer la mise en place de solutions durables. Cet engagement démontre notre volonté d’assumer une responsabilité partagée et proactive, même en dehors des limites du parc, pour concilier développement humain et conservation de la biodiversité.
Il convient toutefois de noter que six colliers ne suffisent pas à assurer un suivi exhaustif de toute la population présente dans la région. D’autres efforts seront nécessaires pour améliorer cette couverture et mieux cerner les dynamiques locales. Lors du moment de l’incident, les six éléphants munis de colliers étaient à 35 km au sud du lieu où l’incident a eu lieu, il ne s’agit donc pas d’un éléphant suivi par le parc.
Il est aussi important de comprendre la dynamique dans laquelle l’homme et l’éléphant vivent dans la contrée en relation à l’usage des terres et ses ressources. Entre 2000 et 2023, la zone le long du fleuve Lualaba entre le parc et Ankoro a connu une déforestation massive de 85 447 hectares, soit 5,5 % de perte de couverture forestière, selon les données de Hansen et al. (2013). En comparaison, le PNU n’a perdu que 1 % de sa forêt sur la même période, malgré sa proximité avec les grandes villes de Lubumbashi et Kolwezi. Le domaine de chasse de Lubudi Sampwe a perdu 4 470 hectares, soit 1,5 % de sa couverture forestière, malgré l’absence de mesures de gestion active. Cela reflète l’ampleur du changement de l’usage des terres autour d’Ankoro.
Nous comprenons pleinement que l’expansion de l’agriculture est souvent une nécessité vitale pour les communautés locales, confrontées à l’insécurité alimentaire et au manque d’alternatives économiques. La cohabitation entre l'homme et l'éléphant devient ainsi un défi complexe, marqué par la compétition pour les ressources, la destruction des cultures, les pertes économiques, et parfois humaines.
Toutefois, cette dynamique contribue aussi à la perte rapide d’habitats naturels. L’augmentation des conflits homme-éléphant dans la zone d’Ankoro est donc très probablement liée à cette destruction accélérée de leur habitat, et non à une croissance de leur population, pour laquelle il n’existe actuellement aucune preuve.
Enfin, il est irréaliste de croire que l’on pourrait simplement “pousser” les éléphants vers le parc pour qu’ils y restent. De nombreuses études ont montré que les éléphants ne respectent pas les frontières humaines. En guise d’exemple, une opération de refoulement entreprise en 2015/2016 n’a pas abouti au confinement permanent du troupeau en question dans le parc.
L’ICCN reconnait qu’il y a une nécessité de trouver des solutions concrètes et efficaces pour une meilleure gestion de la faune dans une zone hors domaine de conservation et d’assurer la protection des communautés locales du territoire de Manono (Secteur Kamalondo – Ankoro & Kabalo). Il est crucial de canaliser nos efforts vers un dialogue constructif avec les autorités compétentes (Coutumières, Étatiques et ceux de la Société civile) afin de mettre en place des stratégies durables pour assurer la sécurité des habitants du Territoire de Manono.
L’incident d'Ankoro souligne l'urgence d'une approche collaborative pour prévenir de futures tragédies et garantir une coexistence plus harmonieuse entre l'homme et l'Eléphant. Cette coexistence a été démontrée dans plusieurs régions à travers l’Afrique, et le parc s’engage à mettre une place un mécanisme de collaboration avec les communautés locale pour améliorer la situation dans la région.

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