Protéger la nature, connecter les gens : réflexions autour du 65e anniversaire de PNNC
- Communication
- 15 sept.
- 5 min de lecture
Contribution: Christine Lain (Directrice Executive & Cheffe de Site PNU)

Partie I : Connaissance, innovation et dialogue mondial pour la conservation – Célébrer 65 ans de PNNC
Entre le 8 et le 10 septembre, j’ai eu l’honneur d’être invité par Parques Nacionales Naturales de Colombia (PNNC) à donner une présentation lors de la commémoration de leur 65ᵉ anniversaire. Dans le cadre de cette célébration, le PNNC a organisé la Rencontre internationale sur les aires protégées, tenue le 10 septembre 2025 à Bogotá D.C., lors du Sommet international sur la durabilité et l’innovation environnementale organisé par la Corporación Autónoma Regional de Cundinamarca (CAR).
Cet événement académique visait à favoriser l’échange de connaissances et d’expériences entre universitaires et écologistes nationaux et internationaux, en mettant l’accent sur le rôle des aires protégées comme moteurs essentiels de la conservation, de l’aménagement du territoire et du développement territorial. Les discussions ont abordé leur évolution historique, leurs défis actuels et leurs perspectives futures.

L’objectif principal était de promouvoir un dialogue holistique sur la gestion des aires protégées, intégrant les avancées scientifiques, technologiques et communautaires. Il s’agissait également d’explorer des stratégies innovantes pour renforcer les efforts de conservation et répondre à la triple crise environnementale, tout en recherchant des solutions durables et un développement territorial harmonieux.
L’un des résultats majeurs de l’événement sera la création d’un Réseau de connaissances pour une gestion innovante des aires protégées, réunissant institutions publiques, communautés locales, organisations sociales, milieu académique et partenaires internationaux.
Cette initiative est non seulement fascinante en soi, mais aussi une démarche que nous, à Forgotten Parks et au Parc national de l’Upemba, soutenons et approuvons pleinement. La question centrale demeure : comment pouvons-nous nous unir au niveau mondial pour améliorer la conservation, la gestion des aires protégées et promouvoir un développement durable juste et équitable ?

Je suis arrivé à Bogotá avec de grandes attentes et un vif désir d’apprendre du PNNC — et ces attentes ont été largement dépassées, notamment lors de ma visite au PNN Chingaza. Ce site, l’un des páramos les plus emblématiques de Colombie, à seulement une heure de Bogotá, est le meilleur exemple que j’aie vu de l’importance vitale des services écosystémiques fournis par les aires protégées. Le Chingaza fournit plus de 500 milliards de litres d’eau par an à plus de 9 millions de personnes vivant à Bogotá et dans les environs. En d’autres termes, sans Chingaza, il n’y aurait pas de vie à Bogotá.
Les leçons sont nombreuses pour l’Upemba, connu comme la « château d’eau » du fleuve Congo : de la participation communautaire réussie via des accords de conservation, au suivi des systèmes hydrologiques, en passant par la collaboration avec le secteur privé sur la gestion de l’eau et les paiements pour services écosystémiques.
Si le parc des Virunga est, pour moi, un modèle à l’échelle d’un parc, alors le PNNC est son équivalent au niveau institutionnel et national. Les deux démontrent que tout est possible lorsque se conjuguent gouvernance, innovation, dévouement et cœur. Comme l’a justement affirmé le Directeur général du PNNC, leurs 65 années d’existence constituent un modèle mondial de gestion efficace des parcs, illustré par le nombre de parcs colombiens inscrits sur la Liste verte de l’UICN.

Partie II : Rangers, résilience et lien humain – Partager l’histoire de l’Upemba en Colombie
Mais cette première visite en Colombie a été plus personnelle que la plupart de mes déplacements récents, et ce pour plusieurs raisons. Tout d’abord, j’ai été invité à partager avec les gestionnaires de parcs colombiens et les rangers du PNNC quelques réflexions et expériences sur un sujet qui me tient profondément à cœur : la conservation de la nature dans des contextes affectés par les conflits, et le rôle courageux et résilient des rangers dans ces circonstances complexes.
Pour l’Upemba, c’était l’occasion de partager non seulement nos défis, mais aussi un message d’espoir : montrer que les histoires de parcs comme l’Upemba et les Virunga en RDC ne sont pas seulement des récits de conflits et de menaces, mais surtout des héritages de résilience et de persévérance. Au-delà des impacts d’une économie de guerre sur les habitats, les espèces et la durabilité, nous avons mis en lumière les rangers : la manière dont ils opèrent dans ces environnements difficiles, les sacrifices qu’ils consentent, les points de rupture qu’ils affrontent, mais surtout leur courage à continuer ce combat pour nous tous et pour les générations futures. Pour la VIE.

Partager notre expérience avec les gestionnaires des 65 parcs nationaux de Colombie fut une humble expérience. La Colombie est l’un des pays les plus avancés au monde en matière de conservation, et protéger le pays le plus biodiversifié de la planète, dans un contexte de conflit prolongé, exige un engagement extraordinaire. Plus de 60 ans de conflit interne, des générations entières marquées par la violence, un processus de paix fragile, des aires protégées et des rangers souvent pris dans les affrontements : les défis sont immenses.
Mais rien ne m’avait préparé à la rencontre avec mes collègues du PNNC. La Colombie occupait depuis longtemps la première place sur ma liste personnelle de pays à visiter — pour sa littérature, sa culture et sa nature — mais ce qui m’a réellement marqué, ce sont ses habitants, et en particulier ses rangers.
Bien que ce fût probablement le voyage le plus court que j’aie jamais fait — moins de 72 heures sur place pour un périple de 96 heures de Lusinga à Bogotá — il en a valu la peine à 100 %.

Je pensais découvrir ce que la Colombie pouvait apporter à l’Upemba, mais je n’avais pas imaginé que l’Upemba pourrait avoir un impact sur eux. Je me trompais. L’histoire des rangers de l’Upemba, des Virunga et de tant d’autres aires protégées congolaises touchées par les conflits a profondément résonné auprès de nos collègues colombiens. Ils ont exprimé une grande admiration pour leurs sacrifices et leur dévouement. Ils ont trouvé inspiration et force dans ces récits, qui reflétaient en partie leurs propres luttes de rangers. Ils ont remercié les rangers congolais pour leur service.
Ce qu’ils ne savaient peut-être pas, c’est qu’ils faisaient de même pour nous, en nous donnant une nouvelle énergie pour continuer. Mon seul regret est de n’avoir pas pu partager immédiatement cette expérience si puissante avec mon équipe de l’Upemba et mes collègues des Virunga. D’où ce message.
La Colombie et le PNNC resteront pour moi le pays et l’institution avec le plus grand « visage humain ». Cette approche centrée sur l’humain se reflète non seulement dans leur travail de conservation communautaire, mais dans tout ce qu’ils entreprennent. Le PNNC est véritablement une institution par les rangers, pour les rangers, et je n’ai jamais ressenti une telle connexion avec des collègues ailleurs.
Merci, de tout cœur, pour votre chaleur, votre amitié et pour l’inspiration que vous nous avez donnée à un niveau aussi profondément humain.
Un merci tout particulier à ma nouvelle amie Valentina, à Luis Olmedo Martínez Zamora, Directeur général du PNNC, pour son leadership visionnaire, à Marta Cecilia Díaz, Directrice adjointe de la gestion des aires protégées, pour son engagement envers un modèle de conservation qui place l’humain au premier plan, ainsi qu’à tous les directeurs et gestionnaires de ces aires protégées incroyables.
Gracias de todo corazón. Estamos juntos.





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